[ GUSTAVE EIFFEL ]

Son histoire

rédigée par Savin Yeatman-Eiffel

  • 1832~

    La jeunesse de Gustave : Gustave Eiffel est né le 15 décembre 1832 à Dijon. Son père est un ancien hussard des armées napoléoniennes, François Alexandre Boenickhausen, dit « Eiffel ». Mais la figure centrale de la famille est certainement sa mère, Catherine Mélanie Moneuse. Fille d’un commerçant en bois, elle a l’idée de se lancer... Lire la suite

  • 1857~

    Les premiers succès : Charles Nepveu connait des difficultés financières mais Gustave Eiffel choisit de rester avec lui, même sans recevoir de salaire. Plusieurs projets du jeune ingénieur Eiffel sont retenus dans des appels d’offre de construction de ponts. Lorsque la société de Nepveu est absorbée par la Compagnie Générale des Chemins de Fers... Lire la suite

  • 1870~

    La Gloire : Les décades 1870 et 1880 sont celles de la gloire. Dans le monde entier ont fait désormais appel à la société G. Eiffel et Cie. pour les ouvrages les plus importants et les plus complexes, comme par exemple : - la gare de Pest en Hongrie - une des premières constructions associant métal et maçonnerie... Lire la suite

  • 1880~

    La Tour Eiffel : Le monument le plus aisément associé à la mémoire du grand ingénieur est sans aucun doute la célèbre tour qui porte son nom. Conçue avec l'aide de deux de ses principaux collaborateurs Maurice Koechlin et Émile Nouguier, ainsi qu’avec la collaboration de l’architecte Steven Sauvestre, cet incroyable projet destiné... Lire la suite

  • 1890~

    L'œuvre scientifique méconnue : Au début des années 1890, Gustave Eiffel est mêlé, bien malgré lui, aux déboires du canal de Panama, pour lequel il avait conçu les écluses géantes. Blessé par les accusations sans fondement dont il fera l’objet – on cherche à tout prix des boucs émissaires – et dont il sera ensuite entièrement lavé par la justice... Lire la suite

  • 1923

    Mort de Gustave Eiffel : Ingénieur hors du commun, grand scientifique, capitaine d’industrie, patriarche respecté par les siens, Gustave Eiffel s‘éteint avec tous les honneurs le 27 décembre 1923 à Paris dans son hôtel particulier du 1 rue Rabelais (désormais détruit).

[ Gustave Eiffel ]

Sa biographie détaillée

1832

La jeunesse de gustave

Naissance de Gustave Eiffel le 15 décembre à Dijon. Sa famille était originaire de Rhénanie et s’était établie à Paris au début du XVIIIème siècle comme maître tapissier en changeant le nom de Boenickhausen contre celui d’Eiffel, en souvenir du plateau d’Eifel près de Cologne (orthographié à l’époque Eiffel). Son père, Alexandre, s’engagea dans l’armée napoléonienne en 1811 à l’âge de 16 ans avant de devenir secrétaire à l’intendance militaire à Dijon en 1823 où il épousa, en 1824, Catherine Moneuse, femme d’affaires avisée dans le commerce de la houille.

Comme ses parents travaillent énormément, le jeune Gustave est en grande partie élevé par sa grand-mère maternelle, une vieille dame aveugle et acariâtre, qui n’hésite pas à le battre. Il n’en tiendra pas rigueur à celle-ci – « la pauvre femme ne frappait pas bien fort » écrira-t-il – ni à sa mère Catherine, pour laquelle il gardera toujours le plus grand respect. Catherine fut de son côté un soutien indéfectible et sa première conseillère. Il entretint avec elle, jusqu’à sa mort, une longue et riche correspondance.
En 1852, Gustave est admis à l’Ecole Centrale. Il choisit comme spécialité la chimie, avec l’idée de reprendre la direction de l’usine de son oncle Jean-Baptiste Mollerat, chimiste et entrepreneur, une autre figure tutélaire importante de son enfance. Une dispute entre le père de Gustave, bonapartiste convaincu, et le vieil homme, ardent républicain, met brutalement fin à ce projet. Gustave Eiffel se rabat alors sur la métallurgie et commence à travailler en 1856 pour Charles Nepveu, ingénieur constructeur de matériel de chemin de fer.
Maison natale, Quai Nicolas Rolin, à Dijon.
François Alexandre Boenickhausen, dit "Eiffel"
Catherine Mélanie Moneuse
Gustave Eiffel à 7ans
Charles Nepveu

1843-50

Études au collège de Dijon.

1852-55

Ecole Centrale de Paris après avoir échoué à l’oral du concours d’entrée à l’Ecole Polytechnique.

1856

Secrétaire de Charles Nepeu qui l’introduit dans le secteur de la construction ferroviaire.

1857

Les premiers succès

Charles Nepveu connaît des difficultés financières mais Gustave Eiffel choisit de rester avec lui, même sans recevoir de salaire. Plusieurs projets du jeune ingénieur Eiffel sont retenus dans des appels d’offre de construction de ponts. Lorsque la société de Nepveu est absorbée par la Compagnie Générale des Chemins de Fer, il met en avant son protégé dont il connaît la rigueur et le sens du défi. C’est Gustave, alors âgé seulement de 25 ans, qui est chargé d’un projet hautement stratégique : la construction du Pont de Bordeaux.

Le pont de Bordeaux, tableau de Charles et Petraud

Pour réussir cet ambitieux projet de plus de 500 mètres de long, au dessus d’un fleuve tumultueux Gustave Eiffel expérimente certaines des techniques qui feront plus tard son succès, comme la construction des fondations des piles de pont à l’air comprimé.

Gustave, désormais ingénieur en chef de la société, est chargé de superviser la construction des autres ponts de la région. Il s’installe à Bordeaux et cherche à s’y marier. Un peu perçu comme un parvenu par la riche bourgeoisie locale, il essuie plusieurs refus. Il appelle finalement sa mère à la rescousse et la charge de lui trouver « une bonne ménagère, qui ne me fasse pas trop enrager » (!) La sage Catherine choisit une candidate idéale en la personne de Marie Gaudelet, que Gustave avait rencontrée dans son enfance. Il l’aimera d’un amour sincère en dépit des circonstances de ce mariage arrangé, et elle lui donnera cinq enfants : Claire, Laure, Édouard, Valentine et Albert.

Fin 1866, Gustave Eiffel, fort de ses succès dans la construction de ponts dans le Sud-Ouest, s’installe à son compte dans des ateliers situés au 48, rue Fouquet à Levallois Perret, juste à l’ouest de Paris. Il remporte très vite une série d’importantes commandes qui vont consolider sa réputation en France mais surtout dans le monde, parmi lesquelles les Viaducs de Rouzat et de Neuvial, ou encore la passerelle de Salemleck en Egypte.

Le jeune entrepreneur surclasse la concurrence par la rigueur extrême de ses projets, conçus tous pièce par pièce dans ses ateliers pour être ensuite simplement assemblés sur les chantiers, et par les innovations techniques qu’il développe et perfectionne – comme le montage en porte-à-faux et le «lançage» de la travée centrale entre deux piles de pont – qui rendent également ses ouvrages plus rapides à construire et plus économiques.

Le jeune ingénieur Gustave Eiffel
Gustave et sa famille, J. David 1876
Viaduc du Rouzat, 1869
Exemple de montage en porte-à-faux

1862

Mariage avec Marie Gaudelet dont il aura trois filles (Claire, Laure, Valentine) et deux garçons (Edouard et Albert).

1864

Gustave Eiffel se met à son compte en tant qu’ingénieur conseil puis ingénieur constructeur en 1866 où il installe ses ateliers à Levallois Perret.

1867

Réalisation des Viaducs de Rouzat sur la Sioule et de Neuvial pour la ligne Commentry-Gannat et premiers travaux pour l’exposition universelle.

1870

Mobilisé comme Sergent dans la Garde Nationale.

1870

LA GLOIRE

Les décennies 1870 et 1880 sont celles de la gloire. Dans le monde entier on fait désormais appel à la société G. Eiffel et Cie pour les ouvrages les plus importants et les plus complexes, comme par exemple :

– La gare de Pest en Hongrie : 145 mètres de long, 25 mètres de haut. C’est la première gare à avoir une façade métallique apparente, et une des nombreuses constructions Eiffel en Europe de l’Est.

Destination Budapest. Photo ancienne de la gare de Nyugati à Budapest en hongrie

– Le monumental Pont Maria Pia sur le Douro au Portugal : 353 mètres de long, portée de l’arc : 160 mètres, hauteur : 61 mètres.  Une forme d’une pureté rare, aussi technique qu’esthétique.

– Le Viaduc de Garabit, au-dessus de la Truyère : 565 mètres de long, corde du grand arc : 165 mètres, hauteur : 122 mètres. Le nouveau système de piles sans entretoisements utilisé, breveté par Eiffel, servira également pour la Tour Eiffel.

Le Pont routier de Cubzac, sur la Dordogne : 1045 mètres de long, 3284 tonnes de charpente. Une construction audacieuse mêlant les techniques de porte-à-faux et de lançage.

– L’ossature de la Statue de la Liberté à New York, œuvre du sculpteur Bartholdi célébrant le centenaire de l’indépendance des Etats-Unis : 120 tonnes de charpente, soutenant une enveloppe de cuivre de 80 tonnes. L’intervention d’Eiffel est décisive pour rendre le projet techniquement viable.

– Les charpentes métalliques du magasin du Bon Marché et du grand hall du Crédit Lyonnais à Paris ou encore la coupole de l’Observatoire de Nice – 22 mètres de large, en suspension sur un bain d’eau permettant sa rotation à la main.

Des constructions Eiffel plus modestes mais très lucratives – prêtes à être assemblées « avec moins de 12 hommes » – se retrouvent également aux quatre coins du monde – Vietnam, Bolivie, Algérie, Java…

– En 1877, Gustave Eiffel perd son épouse prématurément. C’est un terrible choc pour lui. Sa fille ainée Claire, qui le secondera également dans son travail, reprend dès lors les rênes de la famille. Elle restera toujours aux côtés de son père, même après son mariage avec Adolphe Salles.
Gustave avec Claire (au centre), Edouard, Valentine et Albert en 1884.

1875

Gare de Budapest.

1872-74

Travaux en Amérique du Sud (Chili, Bolivie et Pérou).

1876

Commande du Viaduc Maria Pia sur le Douro au Portugal (353 mètres) qui assure sa renommée internationale en raison de la technique nouvelle de construction en porte à faux et lui ouvre les portes de nouveaux marchés dont le pont de Viana d’une longueur de 736 mètres.

1877

Mort de sa femme à l’âge de 32 ans.

1878

Travaux pour l’exposition universelle de Paris.

1880

Gustave Eiffel obtient la construction du Viaduc de Garabit qui le rend célèbre en raison de sa hauteur (122 mètres) et de sa forme parabolique.

1880

LA TOUR EIFFEL

Le monument le plus aisément associé à la mémoire du grand ingénieur est sans aucun doute la célèbre tour qui porte son nom. Conçue avec l’aide de deux de ses principaux collaborateurs Maurice Koechlin et Émile Nouguier, ainsi qu’avec la collaboration de l’architecte Stephen Sauvestre, cet incroyable projet destiné à célébrer l’exposition universelle de 1889, sera financé par Gustave Eiffel lui-même à hauteur de 80% en contrepartie d’une concession d’exploitation initiale de 20 ans.

Toujours impressionnante aujourd’hui, cette tour de 300 mètres est un pari technique encore plus incroyable pour l’époque. Il ne faut pas oublier que c’est près de deux fois plus que le plus haut monument de l’époque – le Washington Monument et ses 169 mètres, lui-même érigé tout récemment en 1884. Gustave devra défendre sa tour contre vents et marrés, sur le chantier comme en dehors. Les opposants sont nombreux, notamment parmi les célébrités de l’époque : les signataires de la tristement célèbre « Protestation des Artistes ». Une fois la Tour achevée, un autre combat commence : assurer la pérennité de l’ouvrage, initialement prévu pour être démonté.

La construction de la Tour s’effectue en 26 mois seulement, du 28 Janvier 1887 au 30 mars 1889, dont 5 mois pour les seules fondations. Les 18 000 pièces tracées au dixième de millimètres dans les ateliers Eiffel de Levallois sont conduites par chariot sur le Champs de Mars où elles sont assemblées sur place, hissées par des grues autotractées sur les rails des futurs ascenseurs par une équipe d’environ 250 ouvriers. Ce gigantesque « mécano » nécessita la pose de 2 500 000 rivets, dont 1 000 000 posés sur le chantier.

Grue de montage
Rivetage des poutrelles
Ouvriers, près du sommet

Le succès est immédiat. La Tour devient très vite le symbole de Paris, et pour la plupart des étrangers, le symbole de la France tout entière. Ces dernières années, elle attire près de 7 millions de visiteurs par an, pour un total de plus de 250 millions depuis son ouverture.

En 1890, Gustave Eiffel s’attaque à un autre projet pharaonique : un ingénieux « pont sous marin » sous la manche qui, s’il est finalement refusé pour des raisons purement politiques, préfigure déjà nettement ce que deviendra «l’Eurotunnel», 104 ans plus tard.

1881-82

Pont de Szeged en Hongrie et ossature de la Statue de la Liberté à New York. Simultanément, il développe la technique des ponts portatifs économique pour l’équipement des chemins vicinaux, les compagnies ferroviaires, les armées en campagne et les colonies pour lesquelles il fournit 4 000 mètres de ponts pouvant être assemblés par 12 hommes en quelques jours.

1883

Viaduc de la Tardes dans la Creuse pour lequel il bat le record de la portée d’une travée droite avec 100,05 mètres lancée par roulement.

1884

Projet de la Tour avec ses deux collaborateurs, Emile Nouguier et Maurice Koechlin.

1886

Mariage de sa fille aînée Claire avec Adolphe Salles qui devient son principal collaborateur ; obtention de la concession de la Tour de 300 mètres pour servir de porte monumentale à l’exposition universelle de 1889.

1887

Début de la construction de la Tour.

1888

Reprise des travaux de construction du canal de Panama après l’adoption du système d’écluses proposé par Eiffel.

1889

La Tour Eiffel est inaugurée en mai et accueille près de 2 millions de visiteurs ce qui rembourse pratiquement Eiffel de ses investissements personnels ; faillite et scandale de Panama.

1890

L'œuvre scientifique méconnue

Au début des années 1890, Gustave Eiffel est mêlé bien malgré lui aux déboires du canal de Panama, pour lequel il avait conçu les écluses géantes. Blessé par les accusations sans fondement dont il fera l’objet – on cherche à tout prix des boucs émissaires à la faillite du projet – et dont il sera ensuite entièrement lavé par la justice, il décide de se retirer des affaires. Eiffel choisit de se consacrer désormais, et jusqu’à sa mort, à d’importantes recherches dont il partagera gracieusement les résultats avec le reste de la communauté scientifique. La célébrité du reste de ses ouvrages a tendance à faire oublier la très grande influence que Gustave Eiffel a eu sur les sciences, notamment météorologiques et aérodynamiques.

En 1889, il fait construire un observatoire météorologique au sommet de la Tour et poursuit ses recherches en différents points de France. Il se passionne également pour l’aérodynamique – Gustave Eiffel a lutté dans tous ses ouvrages contre la force des vents – et fait construire au Champ de Mars, en 1909, une soufflerie où furent effectuées les premières recherches sur les profils d’ailes d’aéroplanes employées par Wright ou Blériot, puis sur des modèles d’avions complets conçus par Nieuport ou Levasseur.

Expériences sur la chute des corps sous la tour Eiffel, 1904
Soufflerie Eiffel du Champ-de-Mars
Soufflerie Eiffel de la rue Boileau, vue en coupe

En 1911, il quitte le Champ de Mars où commençait de s’élever un nouveau quartier et fait construire au 67, rue Boileau dans le XVIe arrondissement, un laboratoire beaucoup plus complet, dont la soufflerie comportait une veine d’air de deux mètres de diamètre pouvant atteindre la vitesse de 30 m/sec. C’est ainsi que fut constituée définitivement la soufflerie aérodynamique «type Gustave EIFFEL» à l’aide de laquelle celui-ci a donné à la méthode des recherches aérodynamiques ses normes essentielles. Ce type de soufflerie, copié et reproduit à travers le monde entier (tout comme celle de la rue Boileau, toujours en activité aujourd’hui) permet d’effectuer des tests aérodynamiques dans des domaines aussi différents que l’aéronautique, l’automobile, le bâtiment, la construction navale, les centrales thermiques ou les ponts.

Ingénieur hors du commun, grand scientifique, capitaine d’industrie, patriarche respecté par les siens, Gustave Eiffel s’éteint avec tous les honneurs le 27 décembre 1923 à Paris dans son hôtel particulier du 1 rue Rabelais dans le VIIIe arrondissement (désormais détruit). Il repose au cimetière de Levallois-Perret.

1893

Condamnation de Gustave Eiffel pour son rôle dans l’affaire de Panama avant d’être réhabilité.

1894-98

Nombreuses expériences scientifiques à la Tour Eiffel dont les premières transmissions de radio.

1903-09

Études sur l’aérodynamisme et construction d’une soufflerie aux pieds de la Tour.

1912

Construction d’un laboratoire aérodynamique à Auteuil & nouvelles études sur l’aérodynamisme qui vont fixer les règles de cette science.

1917

Conception d’un avion monoplan de chasse.

1923

Mort de Gustave Eiffel à l’âge de 91 ans.